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Auguste Honorat - analyses et réflexions.

7 avril 2017

De Xi Jinping à Donald Trump : pourquoi François Fillon va gagner les élections

En restant l’unique candidat de la droite, François Fillon remportait une bataille qu’on aurait pu croire décisive. Pourtant les attaques continuent, à une cadence et une régularité inégalées. Un tel enchaînement médiatique, une réponse judiciaire inédite et d’autant plus surprenante, voilà qui nous oblige à nous interroger sur le positionnement de cet homme qui semble rester l’homme à abattre, loin devant Marine Le Pen.

Mais pour appréhender au mieux une situation aussi complexe, il nous semble plus intéressant de la remettre en perspective : identifier le contexte, en dehors de l’ornière nationale, pour donner du sens et une trajectoire à des évènements en apparence éloignés et étrangers les uns aux autres, et pourtant bien connectés.

Après le brexit et l’élection de Donal Trump, deux électrochocs majeurs sur la scène internationale, impossible de ne pas sentir qu’un vent nouveau souffle sur le monde. Un vent qu’aucune de nos météos n’avait prévu. Et pourtant… ce vent vient de loin et souffle depuis plusieurs années. Alors d’où vient cette tempête ? Où se dirige-t-elle ? Et qu’emporte-t-elle avec elle ?

 

Un vent mondial

 

Aussi étrange que cela puisse paraître, nous pourrions dire que tout commença le 6 février 2012 en Chine. Ce jour-là un monde commença à s’effondrer. Ce jour-là, Wang Lijun, le flic le plus célèbre de Chine (qui a gagné ses lettres de noblesse dans ses méthodes de torture si efficaces pour faire parler les prisonniers politiques) s’enfuit dans la ville de Chengdu pour demander l’asile au consulat américain. Il emporte avec lui, pour seule assurance vie, les plus sombres secrets de la vie politique chinoise et les preuves de ces secrets.

L’armée chinoise bombe le torse et réagit en quelques minutes ; les chars entourent le consulat américain où les GI sont en état de guerre ; des témoins entendent des tirs, la tension entre les deux pays est à son comble. Finalement, les Etats-Unis se couchent, refusent l’asile à Wang Lijun et le « rendent » aux autorités de Pékin qui voulaient le récupérer.

Cet événement si loin pourrait nous sembler vu d’ici presqu’anodin, pourtant avec lui, un mouvement s’est mis en marche et s’est répandu dans le monde entier.

Pourquoi ? Parce que la fuite de Wang Lijun au consulat américain, par les révélations qu’il y a faite, entraina un séisme d’une amplitude inégalée et largement sous-estimé chez nous au sein de la vie politique chinoise. Elle provoqua la chute violente et immédiate de Bo Xilai,  qui était pourtant sensé devenir le prochain dirigeant de la Chine. Elle provoqua la chute de Zhou Yongkang, le « tsar de la sécurité chinoise ». Et surtout, elle provoqua l’arrivée au pouvoir d’un Xi Jinping déterminé : à lutter contre la corruption, à reparler du bienfait des traditions chinoises (dans un contexte où l’idéologie communiste reste ultra dominant), et surtout à déraciner totalement la faction de Jiang Zemin, l’ancien dictateur, qui gardait grâce à ses lieutenants sa main noire sur les affaires.

28 décembre 2016 – 4 ans plus tard. Ce vent initié en 2012 s’est transformé en tempête mais n’a pas encore atteint son apogée. Xi Jinping continue sa campagne anti-corruption : on peut lire dans l’organe de presse Xinhua le communiqué suivant : « La bataille contre la corruption arrive à l’étape du broyage ». Des sources internes au parti communiste ainsi que des dissidents indiquent la même direction : à l’occasion du prochain rendez-vous du parti communiste chinois, à l’automne prochain, Xi Jinping pourrait prendre des mesures historiques pour dissoudre le parti communiste chinois. Sa longue marche pour consolider son pouvoir n’aurait en fait qu’un seul objectif : avoir suffisamment de légitimité et de contrôle pour instaurer en Chine un nouveau régime et sortir son pays de l’idéologie communiste.

C’est à ce moment qu’on comprend l’objectif finale de cette tempête déclenchée 4 ans plus tôt : en finir définitivement avec cette idéologie la plus meurtrière de l’Histoire. Une idéologie qui transforme la souffrance des hommes en sentiment d’injustice, le sentiment d’injuste en haine de l’autre, et la haine de l’autre en meurtre de masse.

 

A différents endroits, une manifestation différente

 

Cette tempête partie de Chine souffle maintenant sur le monde entier, parce que partout autour du monde l’idéologie communiste est présente, sous différentes formes et à différents degrés. Nous pouvons identifier actuellement trois axes autour desquels s’articulent cette poussée en Occident : un libéralisme économique, un conservatisme morale (à l’opposé des libertaires qui souhaitent s’affranchir des traditions et de la morale) et enfin un protectionnisme économique, culturel et identitaire qui marque le réveil des peuples et des nations qui ne veulent pas disparaître dans un mondialisme sans foi ni loi ; mondialisme que l’internationale communiste appelle également de ses vœux, faut-il le rappeler.

Analysée sous cet angle, la victoire de Trump à l’élection présidentielle américaine n’a plus rien de surprenant : libéral, conservateur et protectionniste. Il avait tout pour réussir. Et c’est pourquoi aussi, toutes les tentatives de l’arrêter ont échoué. Contrairement au discours anti-trump incessant en France, Trump parle et défend souvent les valeurs traditionnelles dans ses discours. En s’attaquant à l’Obamacare, c’est l’idéologie socialiste qu’il veut supprimer ; une idéologie qui avait réussi à percer et à s’implanter dans une terre qui en était rester jusque-là presque vierge. Enfin, un des objectifs qu’il s’est fixé est de remplacer le plus grand nombre possible de fonctionnaires plus ou moins douteux issue de l’administration Clinton.

Il est intéressant de noter an apparté qu’en matière de corruption, Chine et Etats-Unis sont liés sur un même dossier: Jiang Zemin, l’un des anciens dictateurs les plus corrompus au monde, a réussi à influencer en 1998 Bill Clinton, alors président des Etats-Unis, lors des négociations pour l’entrée dans l’OMC de la Chine en donnant énormément d’argent à Hillary Clinton via sa fondation. Ironie de l’histoire, c’est encore Hillary Clinton, alors secrétaire d’état à la Maison Blanche sous Obama, qui a négocié la restitution du “super flic” Wang Lijun aux autorités de Pékin. Sans doute ignorait-elle à ce moment que son geste allait, par effet papillon, conduire à son propre échec quatre ans plus tard…

A la lumière de ces rapprochements, il devient évident que Trump et Xi Jinping sont en réalité poussés par la même vague. Evidemment, aucun des deux dirigeants n’en a conscience, mais ce ne saurait empêcher que les ressorts de leur ascension se nourrissent des mêmes forces.

Dans un autre contexte, le brexit marque également la décision d’un peuple qui veut simplement reprendre son destin en main.

L’Europe aurait pu être un beau projet, malheureusement ce projet a échoué. Pour l’instant en tout cas… Parce que l’Europe est devenu pour les peuples qui la composent, une sorte de trou noir où les cultures, les langues, les particularités s’effacent : le symbole de la mondialisation défendue aussi bien par l’extrême gauche libertaire que l’extrême droite capitaliste (ce qu’on pourrait appeler la convergence des extrêmes).

Mais les peuples, leurs cultures, leurs langues, leurs traditions, leurs arts, sont autant de trésors de cette humanité qui doivent être préservés et que la mondialisation menace. Au-delà de la question économique, qui est aussi très importante (sans frontière et protectionnisme intelligent il y aura toujours quelque part quelqu’un de plus pauvre, sans contrainte environnementale ni sociale, pour produire toujours moins cher) l’affaiblissement de l’Europe et sa possible dissolution marque un coup d’arrêt à cette logique mondialiste et les prémices d’une restauration d’une civilisation plus spirituelle, basée sur un héritage culturel ancestrale.

 

Et en France ?

 

L’élection présidentielle à venir forme le catalyseur parfait pour voir si émerge chez nous la vague qui a déferlé sur nos voisins. En étant la première à féliciter Donald Trump pour sa victoire, Marine Le Pen s’est naturellement positionné dans son sillage, espérant certainement profiter d’un vent favorable. Pourtant une analyse de ses positions sur les trois points identifiés nous oblige à relativiser cette première constatation.

Certainement dans le but d’élargir sa base électorale, Marine Le Pen s’est éloigné des positions historiques de son parti : sous l’influence de Philippot et dans une volonté de dé-diabolisation, elle a fini par délaisser le conservatisme moral de son parti pour faire place à des positions plus libertaires et progressistes. Quant à son positionnement économique, Marine Le Pen est plus proche de la défense des avancées socialistes et égalitaires que de la remise en question radicale d’un système à bout de souffle. Au final, seul son protectionnisme et son patriotisme lui permettent de rester dans la course.

On parle souvent des deux visages du Front National, celui de la ligne sociale au Nord et identitaire au Sud, mais on ignore un peu trop ce grand écart opéré par Marine Le Pen : pourtant difficile de garder son équilibre sous ces contraintes… Il semblerait que Marine Le Pen ne soit plus la candidate révolutionnaire promise ; à force de vouloir rassurer et rassembler, c’est un message brouillé et dilué qui parvient aux français. 

Il est intéressant de noter que François Fillon, quand à lui, a suivi la trajectoire inverse de Marine Le Pen : de collaborateur transparent sous l’hyper présidence Sarkozy, il a su profiter des années qui ont suivi pour renouer avec ses racines et finaliser un projet présidentiel radical et assumé, au moins sur le plan économique et social.

Officiellement, son protectionnisme est certes très timide. François Fillon appelle de ses voeux une Europe plus respectueuse des nations (mais comment respecter une nation en niant son existence même, les limites de son corps, ses frontières). Par contre, son libéralisme économique et son conservatisme moral sont clairement revendiqués. Quand des journalistes lui ont reproché sa proximité avec la manif pour tous, là où beaucoup d’autres auraient fait marche arrière en cherchant à modérer leur propos, lui assure : « Je ne vais pas m’excuser d’avoir des valeurs ».

Par ailleurs, en s’attaquant à la question des travailleurs détachés et donc du dumping social au sein de l’union européenne, ainsi qu’en assumant le rôle de l’état dans l’encadrement des négociations des prix de ventes pour les agriculteurs, il semble donner à son libéralisme des limites pragmatiques : une forme de protectionnisme qui ne dit pas son nom.

 

De ce point de vue, la victoire de François Fillon à la primaire de la droite s’explique plus facilement. Ses valeurs et son projet s’inscrivent sans le savoir dans un movement mondiale destiné à effacer les dernières traces de l’idéologie communiste autour du monde. Pour avoir osé ce positionnement, François Fillon est devenu la cible de toutes les attaques ; mais pour avoir osé ce positionnement, il pourrait bien devenir le prochain président français. Malheureusement pour lui, la campagne d’abattage qui se déchaîne contre sa personne ne devrait pas s’affaiblir. Mais contrairement aux apparences des sondages, il est loin d’être certain que ce soit suffisant pour le faire chuter. Les obstacles rencontrés et les épreuves sur un chemin ne sont finalement pas grand-chose face à la marche du monde et de l’Histoire.

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